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frederic dupertout, sano teruo
Maître Sano Teruo et Maître Frédéric Dupertout

En 1973, Frédéric Dupertout se rend pour la première fois au Japon. A Shizuoka, au dojo de Maître Minoru Mochizuki, il s'entraînera auprès de Maître Sano Teruo, le maître de Karaté du Yoseikan.

 

Dans les années 80, Maître Frédéric Dupertout sera le premier étranger à inviter Maître Sano Teruo, hors du Japon, dans son Dojo (Bordeaux, France). Maître Frédéric Dupertout retournera à de nombreuses reprises au Japon. Aussi, pendant près de 40 ans, de la France au Japon, du Japon à la France, Maître Sano Teruo et Maître Frédéric Dupertout n'auront jamais cessé de s'entraîner, de se rencontrer et d'échanger. 

Maître Sano Teruo ayant toujours accordé une grand importance à la partie "Tradition et Combat réel" du Sano Ryu KarAté Jutsu, il décernera successivement à Maître Frédéric Dupertout les titres de Renshi, de Kyoshi, de Hanshi, ainsi que celui de Saiko Shihan (Maître le plus gradé).

Sano Ryu Karate Jutsu
Sano Teruo

Extraits de la correspondance

de Maître Sano et Maître Dupertout

Ici sont reproduits, avec l'aimable autorisation des éditions Le Cercle du Jardin Public, quelques extraits de la correspondance de Maître Sano Teruo et Maître Frédéric Dupertout, issus de l'ouvrage "Le Sano Ryu Karate Jutsu".

Correspondance Sano Teruo et Frédéric Dupertout
" Pourquoi j'écris "
par Maître Sano Teruo
à l'attention de Maître Frédéric Dupertout

KOKUSAI BUJUTSU BUSHI DANTAI 
(KOKUSAI) BUJUTSU SANO-RYU KARATE-JUTSU
(Anciennement YOSEIKAN KARATE-DO)

Il n'était pas dans mon intention ici, de révéler les techniques de mon style, car elles ont une origine guerrière, et conformément aux lois de la stratégie, dévoiler ses techniques et méthodes à l'adversaire serait tout à fait défavorable. Cette façon de penser peut sembler rétrograde, mais les arts martiaux ne sont pas une chose que l'on offre à tout venant. Ils sont le moyen de former un corps et un esprit forts, toujours prêts à se dépasser, à se sacrifier (aujourd'hui pour la justice et le bien de l'humanité, autrefois pour son seigneur, pour la patrie) et se dresser au moindre événement. Les arts martiaux ne doivent pas être sauvages, j'ai ainsi moi-même après de longues années de recherches et d'inventions, mis au point de nombreuses techniques. Certaines peut-être sont similaires à des techniques d'autres styles, ce que j'ignore (par lacune). Quoiqu'il en soit c'est pour ne pas les laisser disparaître après moi que j'écris aujourd'hui.

Ensuite pourquoi publier à l'étranger ? Celà est dommage, mais il se trouve que personne dans mon entourage ne pratique sérieusement les arts martiaux. De plus au Japon il est devenu extrêmement difficile d'entreprendre quelque chose de manière continue et depuis la croissance économique d'après guerre, les jeunes japonais comme les adultes se sont habitués à une vie facile. Par exemple, alors qu'autrefois il était normal de s'entraîner à l'extérieur, même sous la pluie en hiver, aujourd'hui le simple fait de parler d'entraînement en plein air, que se soit en mai - juin où pourtant la saison s'y prête, et tout le monde disparaît. Ainsi je ne crois plus qu'on puisse envisager l'entraînement au sens réel du terme au Japon. C'est pour cette raison que j'ai décidé de publier hors du Japon. Dans mon esprit, c'est justement l'accumulation d'entraînements durs, rigoureux (Il y a bien sûr des limites) qui forme le corps et le cœur, qui fait naître l'amour et réprime la violence, et je crois que c'est ainsi que l'on devient homme, avec le courage d'affronter qui que ce soit, même dix millions d'adversaires si c'est pour la justice et l'humanité. Je suis persuadé que c'est au beau milieu d'un entraînement extrême que l'être humain découvre une envie de rechercher quelque chose. Mais pour comprendre vous devez en faire vous-même l'expérience.

J'ai également dans ma jeunesse recherché cette chose que je n'arrivais pas à saisir, le désir de comprendre me faisait lever dans la nuit pour courir à travers la montagne et je restais bien souvent perdu dans mes méditations. (Ce n'est pas pour moi, quelque chose qui puisse s'expliquer ni s'écrire).

Je pense que c'est extrêmement proche de ce que peut être le summum de l'art ou le zen. (Il faut préciser que je ne sais pas ce que l'art ou le zen recherche).

C'est donc pour les raisons énoncées ici, que j'ai demandé la coopération des premier et second SHIHAN, messieurs Branco, en Australie, et Frédéric Dupertout, en France.

Correspondance de Maître Sano Teruo à Maître Frédéric Dupertout,

in "Le Sano Ryu Karate Jutsu"

Correspondance Sano Teruo et Frederic Dupertout
Différences entre le Sano ryū, les arts martiaux sportifs et les arts martiaux traditionnels
par Maître Sano Teruo
à l'attention de Maître Frédéric Dupertout

Le Sano ryū est un style de bu jutsu où il n’existe pas de techniques interdites. En principe il n’y a pas non plus de compétition, trop dangereuse, même si elle serait possible en éliminant certaines techniques et en adoptant certaines règles comme de nombreux budo sportif ou styles de karate dō traditionnel. Tous les arts martiaux actuels (« budō » traditionnels et « budō » sportifs) pratiquent la compétition selon des règles. C’est une condition indispensable à la sécurité physique des compétiteurs et à la détermination de la victoire ou de la défaite. Il y bien sûr beaucoup de différences selon les styles, cependant on peut observer un certain nombre de principes de base :

  1. la présence d’arbitres

  2. l’existence de techniques interdites

  3. l’existence de parties du corps qu’il est interdit d’attaquer

  4. la limitation de la surface de compétition

  5. la limitation du temps

  6. l’utilisation dans certains cas de protections

  7. la limitation du nombre de compétiteurs

  8. l’interdiction, parfois, d’attaquer dans des zones définies de la surface de compétition

  9. l’interdiction de la frappe dans certains styles;

Dans l’ensemble, tous les arts martiaux sportifs ou traditionnels, ont dans leurs compétitions quelques-unes de ces règles. C’est une condition indispensable pour pouvoir départager les compétiteurs, mais il existe un fossé entre les techniques de compétitions et celles utilisées dans un combat réel. Bien sûr même le Sano ryū, reconnaît l’importance de la pratique du combat réglementé car il permet l’apprentissage du timing. Cependant, laissons de côté les distinctions entre arts martiaux sportifs ou traditionnels actuels et oublions les règles de compétition pour prendre plus de recul. Dans les arts martiaux de percussion par exemple, les techniques de frappes sont souvent utilisées de manière exclusive, pourtant il est indispensable de considérer à la fois la distance ou l’on peut frapper et celle ou l’on peut empoigner l’adversaire. Si malgré des techniques de frappe l’adversaire conserve toute sa combativité, et que de surcroît il excelle dans les techniques de corps à corps alors quel résultat peut-on espérer dans une situation de combat réel ? (Ceci ne doit être en aucun cas considéré comme une critique du sport en tant que tel). De même pour les arts martiaux centrés sur le corps à corps. Si d’une part il est nécessaire de s’entraîner à se défendre contre des techniques de frappe à distance, d’autre part, des techniques au sol comme celles du judō où l’on maintien l’adversaire dans une posture sans possibilité de défense permettent en cas de combat réel de prendre un avantage certain. Quant au kendō, dans le cas d’un combat réel, au premier échange de coups, chacun des protagonistes risque de subir des blessures plus ou moins graves pouvant parfois aller jusqu’à la mort. Et même avec des attaques portées sur des parties autres que le visage, le torse, les bras ou la gorge, il est certain que quel que soit le coup, il risque fortement d’entraîner la mort ou l’incapacité de combattre. Dans le karate il existe des techniques tout à fait typiques où l’on utilise des parties précises du corps pour frapper des zones précises. Si ces techniques (que l’on retrouve également dans la boxe chinoise) n’existaient pas, il serait alors difficile de voir une différence entre le karate et d’autres sports de combat de percussion. Il existe en outre dans les kata du karaté des techniques de projection, de luxation qui ne peuvent, hélas, bien évidement pas être utilisées en compétition. Le Sano ryū en tant que bu jutsu vise le combat réel, l’entraînement se base donc sur des combats pré-arrangés, ainsi que sur la pratique des armes. En combat réel aucune technique n’est interdite. Cela peut sembler brutal et inhumain, mais c’est justement parce que le danger existe que l’amour de son prochain, le respect d’une éthique et de la morale sont essentielles. Car le bu jutsu est un art du combat où l’on met sa vie en jeu.

Correspondance de Maître Sano Teruo à Maître Frédéric Dupertout,

in "Le Sano Ryu Karate Jutsu"

Correspondance Sano Teruo et Frederic Dupertout
Tradition et transmission
 
par Maître Sano Teruo
à l'attention de Maître Frédéric Dupertout

Tradition voilà un terme largement employé dans les arts martiaux. Transmettre et recevoir, perpétuer. Perpétuer une manière de penser. Le terme de tradition sous-entend une certaine gravité, au point qu'on en arrive parfois à déconsidérer tout ce qui n'est pas avéré traditionnel. Mais la tradition est-elle toujours transmise correctement ? (le lecteur me pardonnera mon audace). Pour parler simplement, il me semble qu'il y ait un abîme entre celui qui perpétue la tradition et celui qui parle par expérience. Prenons l'exemple de la technique, je m'avance peut-être, mais je crois qu'on peut dire à coup sûr qu'elle subira des changements de générations en générations, car même en s'appliquant à sa perpétuation fidèle, son créateur lui même avec le temps, lui apportera des modifications. Dans le cas des kata on observe des variations dans l'écriture du nom et même des changements complets dans les mouvements selon les styles, et pour prendre un exemple extrême, certains kata de karaté et de kung-fu (boxe chinoise) ont des noms identiques, et sans doute sont-ils l'œuvre d'une seule et même personne, mais leurs mouvements sont complètement différents. De même, actuellement dans certains styles de kenjutsu (escrime japonaise), j'ai pu constater, pour un même kata, que trois grands experts de même génération le démontraient tous différemment. Ce qui me laisse penser que la tradition n'est que la perpétuation de liens de parenté ou de liens de maîtres à disciples et ne se traduit que par une transmission nominale. Chaque personne est différente, à la fois physiquement et mentalement, et chacun s'adapte à ses conditions et à son milieu différemment. Ainsi personne ne pourra jamais devenir identique au fondateur d'un style. On a tendance à concevoir la tradition comme quelque chose d'absolu, or le dictionnaire définit "tradition" comme "une manière de penser, de faire transmise de générations en générations", on est donc en droit de mettre en doute l'idée d'une transmission exacte, à l'identique. En effet la part de "transmission orale" que sous entend la tradition n'échappe pas, pour parler trivialement, au phénomène du "téléphone arabe". De plus, l'écriture elle même reste soumise à l'interprétation du lecteur, selon son milieu son époque. "Rien n'est absolu", on ne peut empêcher le changement, le monde change constamment, la vie, les modes de pensée, les armes, les manière de combattre. C'est pour toutes ses raisons que dans notre style nous appliquons la devise suivante "rechercher la vérité en respectant la tradition mais sans s'y appesantir, pour adopter et étudier tout ce qui peut être bon".

Dans notre style, parce que nous avons apporté de nombreux changements personnels aux kata traditionnels, nous distinguons leurs noms par des ajouts de chiffres, de nouvelles appellations, ou encore "Sano" en entête, de manière à ne pas salir le nom du créateur originel. (note de l'auteur)

Correspondance de Maître Sano Teruo à Maître Frédéric Dupertout,

in "Le Sano Ryu Karate Jutsu"

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